14 Août 2024
Olivier
Un tribunal américain a porté un important jugement contre Google la semaine dernière. Un juge du district de Columbia a estimé que le géant avait enfreint la loi fédéral antitrust. Il considère que l’entreprise a dépensé des milliards de dollars pour créer un monopole illégal et devenir le moteur de recherche par défaut dans le monde entier. Il s’agit d’un premier grand gain pour les autorités fédérales contre un géant multinational de technologie.
La décision ouvre la voie à un véritable débat pour déterminer les solutions possibles. Celles-ci incluent notamment une rupture avec la société-mère de Google, Alphabet. Une telle rupture changerait le paysage du monde de la publicité en ligne que Google domine depuis des années.
Le jugement de 277 pages représente un feu vert pour les autorités américaines de la concurrence qui poursuivent les grandes entreprises technologiques. Ce secteur est d’hors et déjà sous le feu des projecteurs de tous les partis politiques.
“Le tribunal est arrivé à la conclusion suivante : Google est un monopoliste et il a agi comme tel pour maintenir son monopole.” selon le juge du District de Columbia, Amit Mehta. Google contrôle environ 90% du marché de la recherche en ligne. La part de marché grimpe même à plus de 95% sur les smartphones.
La phase de recours pourrait être longue. Elle peut être suivie d’appels éventuels devant la Cour d’appel des États-Unis, le District of Columbia Circuit et la Cour suprême des États-Unis. Les querelles juridiques devraient se dérouler jusqu’à l’année prochaine. Elle pourraient même facilement se poursuivre jusqu’en 2026 ou 2027.
Les actions d’Alphabet ont chuté de 4,5% lundi dernier, après l’annonce de la décision. Cette chute a toutefois eu lieu au milieu d’une baisse générale des actions technologiques. Le marché boursier en général s’est creusé face aux craintes de récession. La publicité sur Google a représenté 77 % des ventes totales d’Alphabet en 2023.
Alphabet a indiqué qu’il prévoit d’interjeter appel contre la décision du juge Mehta. L’entreprise semble d’ailleurs assez mal accepter la décision. Le ton du communiqué laissait clairement transparaitre une certaine amertume. “Cette décision reconnaît que Google offre le meilleur moteur de recherche, mais conclut que nous ne devrions pas être autorisés à le rendre facilement disponible,” a déclaré Google dans un communiqué.
Le procureur général des États-Unis, Merrick Garland, a qualifié la décision de “victoire historique pour le peuple américain“. Il a ajouté que “aucune entreprise, quelle que soit sa taille ou son influence, n’est au-dessus des lois“.
Karine Jean-Pierre, attachée de presse à la Maison Blanche, a commenté le jugement. Elle a déclaré que “la décision favorable à la concurrence est une victoire pour le peuple américain“. Elle a ajouté que “les Américains méritent un Internet libre, équitable et ouvert à la concurrence.”
Dans son jugement, le juge Mehta a noté que Google avait payé 26,3 milliards de dollars en 2021 pour s’assurer que son moteur de recherche est le moteur par défaut sur les smartphones et les navigateurs. Ces investissements massifs lui ont permis de conserver sa part de marché dominante.
“Le défaut est un bien immobilier extrêmement précieux“, a écrit Mehta. “Même si un nouvel entrant était positionné du point de vue de la qualité pour faire une offre en cas de défaut à l’expiration d’une entente, une telle entreprise ne pourrait être concurrentielle que si elle était prête à verser aux partenaires des milliards de dollars en recettes et à les rembourser intégralement pour toute perte de recettes découlant du changement. »
Il a ajouté : « Google reconnaît bien sûr que la perte des revenus liés au défaut aurait un impact considérable sur ses résultats financiers. Par exemple, Google a prévu que la perte du défaut de Safari entraînerait une baisse significative des requêtes et des milliards de dollars en revenus perdus. »
Le jugement antitrust contre Google est la première décision majeure d’une série de cas portant sur des monopoles présumés dans le secteur des grandes technologies. Cette affaire, déposée par l’administration Trump, a été soumise à un juge de septembre à novembre de l’année dernière.
“Une cession forcée de l’activité de recherche aurait pour effet de priver Alphabet de sa plus grande source de revenus. Mais même la perte de sa capacité à conclure des accords exclusifs de défaut pourrait être préjudiciable pour Google“, a déclaré l’analyste senior Evelyn Mitchell-Wolf, de l’entreprise d’analyse de marché Emarketer. Elle affirme qu’un processus juridique prolongé retarderait les effets immédiats sur les consommateurs.
Au cours des quatre dernières années, les autorités fédérales de la concurrence ont également poursuivi en justice Meta Platforms, Amazon.com, et Apple. Elles affirment que ces entreprises ont illégalement maintenu des monopoles. Ces affaires ont toutes commencé sous l’administration de l’ancien président Donald Trump.
La sénatrice Amy Klobuchar, démocrate qui préside le sous-comité antitrust du Comité judiciaire du Sénat, a déclaré que l’affaire couvrait plusieurs administrations. Elle affirme aussi que la poursuite jouit d’un fort soutien bipartite en faveur de l’application des lois antitrust.
“C’est une grande victoire pour le peuple américain que l’application de la loi antitrust soit bien vivante et bien quand il s’agit de concurrence“, a-t-elle déclaré. “Google est un monopoliste rampant.”
Le dossier d’accusation contre Google a été déposé en 2020. C’était alors la première fois depuis une génération que le gouvernement américain accusait une grande entreprise d’un monopole illégal. Il faut toutefois noter Microsoft a conclu un accord avec le ministère de la Justice en 2004. L’entreprise faisait alors face à des allégations selon lesquelles elle aurait forcé les utilisateurs de Windows à utiliser son navigateur Internet Explorer.
Il est trop tôt pour prédire les conséquences exactes du jugement, mais on peut s’attendre à ce qu’elle soient majeures. Google peut se voir contraint de restreindre ses parts de marché. Cela aurait un impact financier majeur pour l’entreprise.
La juge a écarté la possibilité que Google ait à compenser ses compétiteurs. Elle n’a toutefois pas préciser quels outils et services de Google sont problématiques en tant que tel. Le navigateur Google Chrome devra-t-il, par exemple, être séparé du moteur de recherche Google Search? Il est trop tôt pour dire que sera la nature de la rupture imposée par les tribunaux.
Le marché des moteurs de recherche risque toutefois de devenir plus concurrentiel au cours des prochaines années. Le jugement devrait contraindre Google à restreindre considérablement sa part du marché. Il devrait donc y a avoir plus de possibilité pour les concurrents de se tailler un part du gâteau.
Une rupture forcée entre Google et Alphabet peu avoir de nombreuses conséquences assez imprévisibles. Il faudrait attendre de voir quels actifs feront partie de quel groupe, avant de pouvoir évaluer clairement l’effet de la rupture.
De nombreux outils et services d’Alphabet sont associés au nom de Google. On peut se demander si Google se verrait attribuer par défaut tous ces éléments. La question se pose également pour les autres actifs du groupe, comme la plateforme YouTube et ses parts dans le système Android. L’intégration de ces plateformes joue un rôle majeur dans la position de monopole de Google.
La décision du tribunal du district de Columbia risque d’avoir des conséquences importantes au cours des prochaines. Le jugement antitrust contre Google risque fort de redéfinir les marchés des moteurs de recherche et de la publicité web. L’ampleur de l’impact dépend toutefois grandement de l’étape suivante, qui devrait définir des solutions possibles pour la suite.
L’une des conséquences possible est un séparation forcée de Google et Alphabet. Cette rupture amènerait une partition des actifs du groupe, dont les termes restent à déterminer. On peut toutefois envisager la possibilité que Chrome, Google Search et Google Ad se trouvent séparés ou fragmenter, de manière à rompre le monopole.
On peut toutefois prévoir que de nombreux recours judiciaires auront lieu avant qu’une telle séparation soit imposée. L’impact du jugement est néanmoins majeur, alors que des recours antitrust visent actuellement d’autres géants de la technologie.
Nous espérons que cet article vous a plus et vous a éclairé sur le jugement antitrust contre Google. Si c’est le cas, nous vous invitons à consulter nos autres articles et comparatifs de notre blog. Vous y trouverez les informations les plus récentes sur l’industrie l’hébergement et sur la création de sites web.